Rentrée littéraire 2017·Roman historique

Mille ans après la guerre – Carine Fernandez

Résumé du livre

 

Miguel, alias Médianoche, est un vieil homme dont la vie se résume désormais au temps passé avec son chien Ramón avec qui il partage tout. Son quotidien se voit boulversé le jour où il reçoit une lettre de sa soeur Nuria lui annonçant son arrivée prochaine.

Manuel prend peur d’être à nouveau enfermé dans une vie régie par des règles imposées par sa soeur. Il décide de prendre la fuite et retourne dans le village de son enfance, désormais enseveli sous les eaux d’un barrage. Les souvenirs de la guerre civile et de sa vie dans les camps puis de sa sortie vont alors se rappeler à lui accentués par un évènement dramatique pour Médianoche.

 

Mon ressenti

 

Aujourd’hui je vais vous parler de Mille ans après la guerre de Carine Fernandez aux éditions Les escales. Dès sa parution j’ai été attirée par ce roman et son sujet très sombre et souvent mal connu de cette période tourmentée car passée sous silence. Lors de ma dernière année de Master, j’ai rédigé un dossier sur l’Espagne face à son passé franquiste et comment avait été traitée la mémoire des vaincus au moment de sa transition démocratique dans les années 70. A travers ce roman, Carine Fernandez a su parfaitement écrire, transmettre au lecteur les conséquences de cette omission sur les républicains, les anarchistes, les communistes, les délations afin de s’approprier les richesses d’autrui.

Ils avaient perdu. Le vaincu a tout perdu. Seul l’espoir d’être dans son bon droit, de triompher un jour peut lui redonner une seconde vie. Franco veilla à ce que la défaite dure. Une défaite en continu, année après année, avec son lot d’humiliations et de persécutions, mais surtout ses mensonges, sa falsification du réel. On était en 1954 et il y avait treize ans que les vaincus étaient violés par l’histoire.

Mille ans après la guerre est un de ces romans dont on ne ressort pas indemne avec une écriture simple mais juste les descriptions des violences vécues dans les camps ne tombent pas dans l’horreur mais sont écrites avec une grande sensibilité évitant de s’enfermer dans le sordide. Carine Fernandez est capable à travers les sensations, les bruits, les odeurs de nous immerger dans le roman.

La nature est complice, la nuit se tait, le laisse faire. Va Medianoche où le passé t’appelle. Le silence comme une cape, que soulève de loin en loin le coassement des grenouilles. De tout leur chant ventriloque, elles savent. Par cette malignité de la nature qui contient tout, le passé comme le futur. Qui sait d’avance. 

 

Le pèlerinage de Médianoche à Fuente del Fresno oblige le vieil homme à se remémorer cette guerre fratricide, le gout de cette liberté acquise au prix de la mort de nombre de ses proches notamment son jumeau Médiodia dont l’ombre continue de le suivre. C’est un roman sur la recherche de la rédemption d’un vieil homme qui a survécu quand son frère jumeau est tombé sous les rafales des phalangistes, d’avoir survécu aux camps sans avoir tenté de s’enfuir, lui l’homme de la terre presque analphabète quand tant d’hommes instruits sont morts autour de lui.

Les souvenirs de Médianoche nous permettent de croiser toute une galerie de personnages attendrissants, croyants infiniment en leurs convictions de liberté et d’égalité de l’homme et de la femme, de la République, du partage, ayant foi en l’avenir que la victoire de Franco va leur arracher.

Ce roman est une ode à l’importance de la liberté enfin conquise par cet homme emprisonné dans sa vie d’abord dans les camps puis dans un mariage malheureux, dans sa tête remplie de souvenirs qu’il cherche à oublier et qui peut enfin la gouter et la vivre pleinement.

La fin conclut parfaitement le roman et nous permet de comprendre l’attachement aussi intense entre Médianoche et Ramón et s’inscrit dans la continuité du roman.

 

Merci à Carine Fernandez d’avoir réussi à écrire un tel roman sur un sujet dont on parle  aussi peu et à demi-mot. C’est un récit plein de justesse, de réalisme mais aussi d’humanité envers les faiblesses de ces personnages. C’est un roman difficile à lâcher malgré les moments difficiles.

Enfin, je remercie Babelio et Les escales qui m’ont permis de découvrir ce merveilleux roman dans le cadre de Masse critique.

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